Fléau de nos sociétés modernes, le chômage est un mal nécessaire, disent les économistes. Ces derniers parlent même de "chômage d'équilibre" et expliquent que, sur un sentier de croissance équilibré de l'économie française, il ne peut en être autrement que de constater un déséquilibre entre l'offre et la demande de travail. Bref, on ne peut rien y faire et, forts de cette caution scientifique, nos politiques semblent avoir abandonné le combat (sauf lorsqu'il concerne directement leur propre fief électoral : un chômeur de plus chez le voisin, ce n'est pas grave, mais un chômeur-électeur de plus chez soi, c'est la fin du monde !).
Avant la crise économique de 2008-2009, le taux de chômage en France était de 7%. Malgré un retour des créations d'emploi en 2010, il s'établit désormais à 9% de la population active (source : France Inter), ce qui signifie que l'économie française a continué à détruire plus d'emplois qu'elle n'en créait. Derrière le constat statistique et l'explication "mécanique" (équilibre offre/demande de travail), se jouent des drames humains et familiaux que notre système de protection sociale peine à résoudre. Être chômeur, même si c'est un mal naturel aux yeux des économistes (bof, c'est tombé sur vous mais, sinon, ç'aurait été quelqu'un d'autre), reste un drame personnel : comment comprendre que l'on est devenu inutile à la collectivité ?
Mauvaise nouvelle, d'aucuns parient sur le fait que le taux de chômage ne retombera pas à 7% dans les années à venir. Trois raisons à cela :
- la crise économique a forcé les entreprises à encaisser le choc en se restructurant (traduction : celles qui ont survécu ont gagné en productivité) de sorte que l'économie française est désormais capable de produire autant avec moins de salariés ;
- la concurrence internationale (produire ailleurs avec des salariés moins chers) n'est pas près de diminuer : tandis que les actuels pays émergents vont concurrencer l'économie française sur des secteurs à valeur ajoutée de plus en plus haute , les pays émergents de demain continueront d'exploiter le segment des produits manufacturés à bas coût salariaux ;
- le vieillissement de la population française entraîne une diminution de la population en âge de travailler, de sorte que, à nombre de chômeurs identique, le taux de chômage sera mathématiquement plus élevé (ah ? c'est donc pour cela qu'ils ont repoussé l'âge de la retraite ?).
Quelles solutions avons-nous ? Je ne sais pas et je me garderais bien de conseiller quoi que ce soit aux économistes de Bercy. On peut toutefois observer plusieurs choses :
- Contrairement au Moyen-Age, on sait maintenant (au moins dans les sociétés dites "avancées") satisfaire l'ensemble des besoins de la population sans faire travailler tout le monde. Peut-on organiser le chômage comme un tour de vacance sociale, d'oisiveté choisie, de contribution à la vie collective non plus sous forme de force de travail ou d'intellect mais sous forme d'affect (création artistique, vie associative, etc.) ?
- Le déficit d'emplois en France serait moins grand si l'on importait moins. Certes, mais faut-il contraindre artificiellement nos importations à baisser ? Est-on prêt à payer plus cher pour la même chose faite sur le territoire national ? Est-on prêt à priver les pays en voie de développement des flux économiques que l'on déverse chaque année sur eux (et dont on espère que, malgré tous les dictateurs et mafieux locaux, une fraction bénéficie quand même à la population) ? Est-on prêt à jouer seul, sans les autres pays, et à se soustraire aux règles de l'OMC et de l'UE en matière de libre échange ? (ah, que n'a-t-on mis en place une taxe carbone européenne !)
- Augmenter l'offre de travail signifie produire plus et vendre plus (présupposé : dans un système ouvert et concurrentiel qui nous empêche de faire régresser la productivité comme aux plus grandes heures du communisme). Est-on capable de vendre plus à la population française (au vu de son pouvoir d'achat et au vu de notre capacité d'innovation pour créer de nouveaux biens et services) ? Est-on capable de vendre plus aux autres pays (au vu de notre coût élevé du travail) ?
Beaucoup de questions, peu de réponses.
Le communisme s'est effondré. Le capitalisme ne perdure que par une fuite en avant (innover toujours, pour vendre toujours plus). Y a-t-il un système qui ne va pas dans le mur ?
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