mardi 11 janvier 2011

Plafonner les salaires des grands patrons

Voilà bien le prototype de l'idée démagogique, qui ne coûte rien et rapporte quelques voix supplémentaires. On stigmatise une minorité aux pratiques scandaleuses - et c'est probablement un scandale, du point de vue moral - pour s'attirer les suffrages, ou au moins la bienveillance, de la majorité silencieuse (et probablement envieuse).

Pourtant, l'idée n'est que de la poudre aux yeux. Mettez un plafond sur les rémunérations, les entreprises et leurs conseils d'administration trouveront toujours le moyen de rémunérer considérablement les services de tel ou tel PDG : primes diverses, stock options, bonus, avantages en nature, facilités pratiques, parachutes, garantie de retraite, financement des études des enfants, mise à disposition d'appartement, de domestiques, offres de voyages et de loisirs, etc. Les moyens de contenter quelqu'un sans le rémunérer sont innombrables. L'argent n'est toujours qu'un moyen, pas une fin en soi : il suffit donc d'offrir les fins elles-mêmes puisqu'on ne peut rémunérer plus !

Bref, plafonner les rémunérations des dirigeants ne bridera pas leur niveau de vie incommensu-rablement plus élevé que celui de l'homme de la rue. Cela ne génèrera pas non plus de revenus supplémentaires pour les salariés, car il faudra bien les payer, ces avantages annexes offerts en compensation de la réduction de salaire.

On peut donc tenter de brider non seulement les revenus, mais aussi tous les éléments de "bien-être" des patrons. Soit. Mais il est à craindre qu'une telle disposition, par nature liberticide pour les entreprises et les patrons, paraisse inconstitutionnelle aux yeux des sages (comme feue la taxe carbone, pour ceux qui n'auraient pas compris). Non, à tout prendre, il vaut mieux taxer encore plus que plafonner les revenus (quoique, là aussi, la constitutionnalité puisse être discutée). Au moins, la taxe fera rentrer quelques revenus supplémentaires dans les caisses de l'État (quoique bien maigres à l'échelle du déficit public, car il n'y a pas tant de patrons surpayés que cela et notre déficit est abyssal).

Deux choses encore :
- Plafonner les revenus risque d'inciter nos patrons à exporter leurs services. Dans la concurrence internationale pour les postes de PDG, la loi de l'offre et de la demande joue aussi. Nous risquons donc de nous retrouver, en France, avec des patrons moins doués que leurs homologues étrangers, donc des entreprises peut-être moins aptes à saisir les opportunités que les autres.
- Enfin, quelle est donc cette morale qui nous pousse à vouloir brider les revenus des uns sous prétexte que l'on n'en bénéficie pas soi-même ? Cela me rappelle le premier de la classe que l'on fait tomber dans l'escalier pour se venger du fait qu'il est meilleur que nous. Il n'y a pas à dire, je serais content de gagner des mille et des cents, même si j'aurais quelques scrupules. Tant mieux pour eux, donc. Tant qu'ils n'ont pas l'attitude hautaine et ingrate des premiers de la classe imbus d'eux-mêmes, je ne vois pas de raison de leur en vouloir.

Je ne suis pas grand patron, et je n'aspire pas à le devenir.

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